A l'ouest, du nouveau !

Grigory Konvisserre est tout jeune militaire lorsque l’Allemagne envahit l’URSS. Engagé sur plusieurs fronts, il rend compte des souffrances au combat, du patriotisme des troupes jusqu’à ce que, de l’ouest… vienne du nouveau.

Il a souvent du mal à cacher les drames et les souffrances vécus. Le baptême du feu en juillet 41 est terrible pour son régiment de fusiliers motocyclistes. Il n’a que des grenades à opposer aux mortiers : nombre des camarades de Grigory Konvisserre tomberont sur place. « Si l’ordre de reculer n’avait pas fini par être donné, nous serions tous morts lors de notre premier combat » explique-t- il. À la surprise générale, en dépit du pacte de non agression signé deux ans plus tôt entre les deux pays, l’Allemagne vient d’envahir l’URSS.

« On arrachait de l’herbe pour manger. »
Grigory Konvisserre en 1944.

Le soldat natif d’Ukraine combat sur plusieurs fronts : Smolensk à l’ouest, Kiev au sud-ouest, puis le Caucase. À partir de 1943, il rejoint le front central et participe à la grande bataille de Biélorussie, à l’été 1944. Les Alliés viennent alors de s’engager dans la Bataille de Normandie. « L’ouverture du
‘‘deuxième front’’, nous l’attendions depuis 1942. S’il avait eu lieu cette année-là, l’Union soviétique
aurait subi beaucoup moins de pertes ! Les Alliés nous ont beaucoup aidés en 1944 par ce deuxième front et par leur superbe équipement.
» Les conditions de vie des soldats soviétiques s’améliorent également sensiblement : « En 1943, on arrachait de l’herbe pour manger. Alors, quand les conserves de viandes américaines sont arrivées, on a soufflé ! On dormait par terre, sur la neige, et l’on se réveillait les uns les autres pour ne pas mourir gelés. Avant le combat, on nous donnait 100 grammes de vodka, qu’on appelait ‘‘les 100 grammes de Staline’’ ! ». En quatre ans de guerre, Grigory passe deux ans et demi au front. « Personne ne pouvait tenir un rythme pareil. On avait des moments de repos. Je me souviens alors des danses, des clubs… On menait une vie normale. » Il n’ignore toutefois pas le sort que connaissent les civils. « La Biélorussie a perdu un tiers de sa population. Les fascistes imaginaient l’esclavage pour les survivants. Mes parents ont eu de la chance, mais ma tante a péri. » Malgré cela, jamais lui ni ses compatriotes n’envisagent la soumission à l’envahisseur : « Les conditions étaient très difficiles, mais je peux dire avec certitude qu’il ne nous venait pas à l’idée que l’Allemagne puisse vaincre. »

« Pour la patrie, pour le parti, pour Staline ! »

Le patriotisme est plus fort que tout, comme le crient les soldats en armant leur fusil : « Pour la
patrie ! (fusil à la hanche) Pour le parti ! (fusil en avant) Pour Staline ! (fusil bras tendus).
» Grigory
apporte toutefois une nuance : « Bien sûr, on a combattu pour la patrie et pour Staline, mais pendant la guerre, personne ne se demandait si untel était communiste ou pas. » La Biélorussie délivrée, il participe à la libération de la Pologne, de Berlin et de la Tchécoslovaquie. L’officier soviétique se souvient du régiment Normandie Niemen, de ses « pilotes français héroïques, dont quatre ont reçu le titre de Héros de l’Union soviétique », et des paroles d’une chanson écrite en leur honneur. Un sourire de fierté éclaire son visage lorsqu’il évoque la libération, avec son unité, des 7 000 prisonniers du camp de concentration de Babelsberg, près de Berlin. «Parmi eux, il y avait Edouard Herriot, ancien président du Conseil de la IVe République et son épouse ! »